Le programme de dialogue actionnarial a été créé en mai 2004 sous l’impulsion d'Ethos et de deux caisses de pension. Deux décennies plus tard, ce sont 186 caisses de pension qui font confiance à Ethos pour mener un dialogue continu et constructif avec les plus grandes entreprises cotées en Suisse sur des thèmes liés à la gouvernance et la durabilité afin de les inciter à améliorer leurs pratiques.
C’était le 18 mai 2004. La caisse de pension de la ville de Zurich et la caisse de prévoyance du personnel des établissements publics médicaux du canton de Genève (aujourd’hui CPEG), toutes deux membres de la Fondation Ethos, confiaient à Ethos Services « le soin de chercher le dialogue avec les entreprises [cotées en Suisse] pour les sensibiliser à des thèmes précis, dans le but d’augmenter ainsi durablement la valeur de ces entreprises ». L’Ethos Engagement Pool (EEP) Suisse était né.
Le concept était alors novateur et demeure, 20 ans plus tard, unique en Europe continentale : des investisseurs institutionnels, à commencer par des caisses de pension, décidaient de se regrouper au sein d’un « pool » afin de prôner les meilleures pratiques en matière d’environnement, de social et de gouvernance (ESG) auprès des entreprises dans lesquelles ils investissent. En l’occurrence, les 100 (puis les 150) plus grandes entreprises cotées en Suisse.
Depuis, le nombre des membres de ce programme de dialogue actionnarial n’a cessé d’augmenter. Ils étaient ainsi 50 en 2010, 100 en 2014 et 150 en 2021. Aujourd’hui, l’EEP Suisse compte 186 membres, qui représentent, ensemble, quelques CHF 360 milliards d’actifs sous gestion, dont 10 à 15% environ sont investis dans des actions d’entreprises cotées en Suisse. Ce succès confère aux membres du « pool » un poids, une légitimité et un pouvoir d’influence d’autant plus importants lorsqu’il s’agit d’engager le dialogue avec des entreprises sur des enjeux essentiels qui touchent à la durabilité.
Ethos et les membres du pool ont toujours considéré que ce dialogue discret est essentiel et complémentaire à l’exercice des droits de vote. En effet, le refus de propositions soumises lors des assemblées générales devrait être systématiquement discuté et expliqué aux entreprises.
Des thèmes et des enjeux toujours plus nombreux
Les thèmes de dialogue se sont eux aussi multipliés au fil des années : rémunérations, gouvernance, diversité, droits des actionnaires, reporting environnemental et social, code de conduite, respect des droits humains, changement climatique, biodiversité, responsabilité fiscale. Les membres du « pool » se réunissent ainsi une fois par année pour suggérer et définir de nouvelles thématiques de dialogue, à l’image de la responsabilité numérique qui s’est imposée comme un thème prioritaire dès 2020.
La réaction et l’accueil des entreprises a elle aussi évolué depuis 2004. « Au début, les entreprises étaient plutôt réticentes et considéraient que ce n’étaient pas à leurs actionnaires de s’occuper des questions et des enjeux liés à la durabilité et à la gouvernance, se remémore Vincent Kaufmann, directeur d’Ethos. Certaines suggéraient même que les actionnaires mécontents avaient meilleur temps de vendre leurs titres. Mais avec le temps, la plupart des entreprises ont compris qu’il était dans leur intérêt de mener un dialogue proactif avec leurs actionnaires et ce sont désormais elles le plus souvent qui recherchent le dialogue afin d’anticiper au mieux leurs attentes. »
Il faut dire qu’en 20 ans le dialogue actionnarial a fait ses preuves. La gouvernance des entreprises cotées en Suisse s’est considérablement améliorée, avec notamment beaucoup moins de cumul des mandats (président/CEO), un meilleur niveau d’indépendance et davantage de diversité, des genres mais aussi en matière de compétences, au sein des conseils d’administration. La transparence et le reporting des entreprises ont eux aussi progressé, que ce soit pour les rémunérations ou tout ce qui concerne la durabilité. Ethos et les membres du pool ont aussi démontré leur capacité à intensifier les mesures de dialogue, que ce soit pour soutenir l’indépendance de Sika entre 2014 et 2018 ou pour influencer de manière plus soutenue les entreprises en déposant des résolutions d’actionnaires dans le cadre des campagnes « Stop Chairman CEO », « Say on Pay » ou, plus récemment, « Say on Climate ».
Désormais, 20 ans après le lancement du pool, le dialogue actionnarial a enfin été reconnu comme faisant partie intégrante de l’actionnariat actif en étant inclus, au même titre que le vote aux assemblées générales, parmi les neuf principes de base du « Swiss Stewardship Code », un ensemble de lignes directrices publié en octobre 2023 par Swiss Sustainable Finance et AMAS.
